Comment charmer les Muses en restant homme?
DOI:
https://doi.org/10.26512/dramaturgias24.52133Parole chiave:
Hymnes delphiques à Apollon, Danse grecque antique, PythonAbstract
Les Muses sont censées inspirer les poètes qu’ils soient hommes ou femmes mais les hymnes delphiques à Apollon, composés par Athénaios et Liménios en 128 av. J.-C. étaient destinés à des hommes. Ces hymnes étaient chantés lors de Pythaïdes, processions occasionnelles envoyées à Delphes par les Athéniens et y prenaient part surtout les hommes. Dans ces deux hymnes, les Muses sont très présentes, à la fois inspiratrices des poètes, et destinatrices du chant avec Apollon. L’hymne d’Athénaios pose cependant un double problème pour une procession masculine. Premièrement, les harmonies en sont en partie féminines puisque l’hymne use des genres diatonique et chromatique. Le genre chromatique a été introduit et mêlé dans la tragédie durant la seconde moitié du Ve s. av. J.-C. par le poète Agathon, qui passait pour être efféminé, ce qui a connoté ce genre de manière féminine. Comment peut-on préserver sa masculinité dans un contexte harmonique qui pousse à la féminisation ? Deuxièmement, la métrique montre que l’ensemble est composé de sections créto-péoniques et le crétique, dont on sait grâce à P. Ceccarelli qu’il pouvait être utilisé dans la pyrrhique et dans la danse des Courètes, était connoté comme masculin. Si l’on interprète ces sections comme un rythme irrégulier à 5/8, ce rythme permet à lui seul de ramener la procession dans le champ de la masculinité. Mais Annie Bélis fait remarquer à juste titre qu’il n’est pas facile de chanter dans un tel rythme et que l’on peut être tenté de le transformer. Comment parvenir à charmer les Muses en restant homme lorsque les harmonies glissent vers le féminin, ou que le non respect d’un rythme masculin peut aussi y conduire ? Même si les débats sur la féminisation de la musique au IIe s. av. J.-C. n’ont plus la même importance qu’à l’époque d’Agathon, il y a sans doute eu une volonté consciente ou inconsciente de renforcer la caractère masculin de la procession : les percussions apportaient une aide essentielle pour maintenir le rythme intact, et la danse avait un rôle important à jouer. On étudiera d’abord comment les pas peuvent s’adapter idéalement au rythme et permettre de le préserver, tout en libérant une énergie masculine dans la manière de poser les pieds au sol ainsi que les quelques gestes effectués. Puis on verra que la troisième strophe par l’évocation du combat d’Apollon contre Python d’une part et contre les Galates en 279 av. J.-C. exige une gestuelle guerrière qui est typiquement masculine, même si elle n’est pas dépourvue d’esthétique.
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